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MEURTRES EN CHAMBRE CLOSE

 

Un cadavre est retrouvé seul dans une pièce close dont toutes les issues sont fermées de l'intérieur. Bigre ! Où est donc passé l’assassin ? S’agirait-il d’un fantôme ? Se serait-il transformé en courant d’air ? Ou en Lilliputien qui se serait enfui par le trou de serrure ?

Il s’agit là de la situation de base du Meurtre en chambre close, dont Gaston Leroux nous a offert l’archétype du genre, avec son célèbre Mystère de la chambre jaune.  Plusieurs auteurs de roman policiers se sont essayés à ce difficile exercice de style, dont Agatha Christie, G. K. Chesterton, Ellery Queen, Boileau-Narcejac, pour ne citer que les plus connus. Mais peu d’entre eux ont exploré ce thème de manière systématique, comme l’a fait John Dickson Carr, qui passe à juste titre pour le grand maître du genre ; ainsi que Paul Halter, qui semble s’être donné pour mission de poursuivre l’œuvre de son illustre prédécesseur.

Il faut signaler qu’aucun d’entre eux n’est tombé dans le piège d’un problème de mathématique, avec sa froideur cartésienne. Au contraire, leurs récits baignent dans une atmosphère fantastique (maisons hantées, lieux maudits, spectres, vampires) et relèvent davantage du conte de fées macabre que du roman-problème. Souvent, le meurtre semble avoir été commis par une créature surnaturelle, car une intervention humaine paraît exclue, ou semble être la conséquence d’une malédiction ancestrale, d’une divination ou d’autres phénomènes inexplicables. On parle alors de Crimes impossibles, qui sont détaillés dans la rubrique Fantastique.

Le Meurtre en chambre close relève indiscutablement de cette catégorie, mais il est plus restrictif, en ce sens qu’il est commis dans un local clos, comme dans l’exemple vu plus haut. Néanmoins, cette spécialité se décline en plusieurs variations, qui sont détaillées ici.

Il est parfais difficile de faire des distinctions précises, surtout lorsqu’il y a interpénétration des genres, ce qui est souvent le cas chez Halter. En outre, chaque histoire pose souvent plusieurs problèmes de cette nature. Cette modeste rubrique n’a d’autre ambition que d’en donner une idée globale, pour permettre éventuellement une approche sélective de l’œuvre.

 

1) Pièce fermée de l’intérieur

Toutes les issues sont verrouillées de l’intérieur. Il est nécessaire de fracturer une porte ou une fenêtre pour pouvoir pénétrer dans la pièce où gît la victime, et constater que l’assassin brille par son absence. Cette situation de base est le thème central de l’œuvre de Halter, que nous retrouvons donc dans bon nombre de ses romans. Entre autres :

 

• La mort vous invite. Outre son forfait, l’assassin s’est permis d’introduire dans la pièce un repas chaud et encore fumant de manière quasi miraculeuse !

• À 139 pas de la mort offre, en prime, un singulier problème de poussière vierge sur

le sol, que l’assassin aurait dû en toute logique marquer par son passage.

• La Malédiction de Barberousse. Massacre de prisonniers dans une geôle verrouillée et sous haute surveillance.

• Le Cercle invisible. Sur fond de légende arthurienne, un meurtre est commis au sommet d’un tour inaccessible, avec une arme très éloignée de la scène du crime et solidement scellée dans le roc.

• Le Géant de pierre. Meurtre en chambre close à l’époque minoenne !

• La Toile de Pénélope. La seule issue possible est scellée par une toile d’araignée !

• Le Tigre borgne. Peut-être la chambre la plus close de toute l’histoire du roman policier. Triplement close par trois portes verrouillées en enfilade, un cordon de vigiles qui patrouillent en permanence autour des lieux, ainsi qu’un éléphant dressé, et des eaux infestées de crocodiles dans le lac qui entoure le pavillon.

• La Chambre d’Horus. L’arme du crime est en outre retrouvée dans une autre pièce, dûment scellée, à l’intérieur d’un sarcophage, en compagnie d’une momie, laquelle semble avoir déjà plusieurs victimes à son actif.

 

2) Pièce étroitement surveillée

Dans cet exemple, la pièce n’est pas nécessairement fermée de l’intérieur, mais toutes ses issues sont sous la surveillance constante de témoins dignes de foi. Ce sont donc eux qui constituent les « cloisons infranchissables ». C’est la variation la plus courante. Paul Halter ne l’a pas occultée pour autant !

 

• Le Brouillard rouge. Un meurtre commis lors d’un tour d’illusionnisme.

• La Tête du tigre. Comme avec la lampe d’Aladin, un génie apparaît lorsqu’on frotte une pièce en bronze. Mais dans le cas présent, il agresse mortellement les incrédules !

• La Septième Hypothèse. Disparition inexplicable d’un pestiféré lors de son  transport sur un brancard dans un étroit couloir borgne.

• La Malédiction de Barberousse. Meurtre commis au sommet d’une tour sous étroite surveillance.

• Le Crime de Dédale. Encore un crime à l’époque minoenne, dont la victime n’est autre que le Minotaure ! L’assassin semble avoir réussi à traverser les murs grâce au pouvoir qu’il aurait tiré de mystérieuses pierres bleues !

• Lunes assassines. Sous l’influence d’un tableau maudit, un homme se suicide dans une pièce aux issues surveillées.

 

3) Pièce scellée

Des témoins sont amenés à sceller une pièce, dans laquelle se produira un phénomène incompréhensible, qu’il s’agisse d’un assassinat, d’une disparition ou d’une réapparition de personne.

 

• La Quatrième Porte. Il y aura bien un meurtre après la mise sous scellés de la pièce, mais la victime sera une personne différente de celle qui y fut enfermée !

• La Chambre d’Horus. Après la mise sous scellés provisoire d’un tombeau égyptien, où la momie du pharaon brillait par son absence, celle-ci va réapparaître dans son sarcophage comme par enchantement !

 

4) Crime dans la neige

La victime est retrouvée assassinée au milieu d’une vaste étendue de neige, et nulles traces visibles autour d’elle, si ce ne sont celles de ses propres pas. Le lieu est donc « clos » par la neige. Dans les mêmes circonstances, le crime peut également avoir été commis à un autre endroit, comme dans un pavillon entouré d’une couche de neige immaculée. La chute de neige étant antérieure au crime, comment l’assassin a-t-il pu quitter les lieux sans laisser derrière lui la moindre empreinte ?

C’est peut-être là une des plus difficiles gageures du genre, qui semble avoir trouvé une grâce particulière aux yeux de Paul Halter. Peut-être à cause du contraste entre la pureté de la neige et la noirceur de l’acte criminel perpétré ? Quoi qu’il en soit, il a relevé le défi à maintes reprises — huit fois très exactement — comme en témoignent :

 

• La Quatrième porte. Crime commis dans une maison entourée de neige vierge.

• La Mort derrière les rideaux. Mrs Garfield est poignardée tandis qu’elle rentrait chez elle. Ses pas sont bien visibles dans la neige, mais nulle trace de ceux de l’assassin !

• Le Roi du désordre. L’histoire entière semble figée sous une épaisse couche de neige. L’assassin s’en donne à cœur joie. À plusieurs reprises, il commettra ses méfaits sans laisser de trace sur son passage. À noter un meurtre particulièrement incompréhensible en pleine campagne, au milieu d’une immense étendue de neige vierge.

• L’Arbre aux doigts tordus. Un homme est retrouvé étranglé au pied d’un arbre, et nulle trace de pas dans la campagne enneigée.  

• Le Spectre doré. Un mystérieux spectre doré poursuit ses victimes sur la neige sans laisser d’empreintes.

• Meurtre dans un manoir anglais. (Chapitre 1 : Mlle Rose) Crime commis dans une maison située au fond d’une ruelle enneigée. Seule une fenêtre ouverte aurait pu permettre à l’assassin d’approcher sa victime, mais la neige immaculée semble infirmer cette hypothèse.

• L’Abominable Bonhomme de neige. (Nouvelle) Un homme sauvagement poignardé à coups de baïonnette gît au pied d’un bonhomme de neige, qui arbore fièrement l’arme du crime. Nulle trace dans la neige à part celles de la victime. Mais le plus étonnant, dans cette incroyable histoire, c’est qu’un témoin affirme dur comme fer avoir vu le bonhomme de neige s’acharner sur le malheureux !

• La Marchande de fleurs. (Nouvelle). Ici, c’est le Père Noël lui-même qui semble avoir commis le crime. On voit même nettement les empreintes de son traîneau, apparaissant et disparaissant en s’estompant comme s’il était venu du ciel, dans une ruelle enneigée qui donne accès au lieu du drame. Et évidemment, pas d’autres empreintes alentour…

 

5) Crime dans le sable

Postulat semblable au précédent, sauf que la surface vierge est constituée de sable ou de boue immaculée, voire de poussière. Paul Halter n’a pas manqué d’exploiter cette situation ébouriffante, notamment dans Les fleurs de Satan, dans Meurtre dans un manoir anglais (l’histoire de Mme Leblanc), ainsi que dans :

 

• À 139 pas de la mort. Un cadavre fraîchement déterré d’un cimetière est replacé dans sa propre maison, inviolée depuis son décès qui remonte à plusieurs années. Lorsque les policiers seront amenés à visiter les lieux, ils trouveront le cadavre dans une des pièces centrales, et noteront l’épaisse couche de poussière qui recouvre tout le sol…  Mais elle est vierge de toute empreinte !

• Les Sept Merveilles du crime. L’assassin a eu l’élégance de prévenir les policiers de l’heure et de l’endroit de son futur forfait. Ils le talonnent, mais arrivent trop tard. C’est au milieu d’une grande étendue de terre détrempée par les averses, qu’ils retrouveront le corps d’Anaïs Charles, un couteau de cuisine planté dans la poitrine. Comme pour mieux mettre son crime en lumière, l’assassin a allumé 36 chandelles, soigneusement disposées autour de sa victime. Et bien sûr, seules les empreintes de celle-ci sont visibles sur le sol boueux…

• Le Chemin de la lumière. Dans la vaste cour d’un temple, on égalise soigneusement le sable au sol afin de confondre celui qu’on soupçonne de vouloir occire la prêtresse réfugiée dans le temple. Mais en vain. Elle sera découverte assassinée le lendemain, alors que nulle trace de pas n’apparaît sur la surface de sable…

 

 

                                                                           Roland Lacourbe